25 mai 2012

Sept ans s'étaient écoulés depuis que Richard avait rencontré la "bonne fée". Depuis cinq ans, il n'avait plus eu recours aux conseils de monsieur Martin. Il l'avait simplement appelé pour lui annoncer son mariage et la naissance de ses deux fils. A chaque fois, le comptable l'avait félicité et l'avait assuré qu'il transmettrait la nouvelle à M.Vitti. Mais celui-ci ne s'était jamais manifesté.
A plusieurs reprises, il avait vu arriver des clients vêtus d'un costume noir et s'était dit en lui-même : "Ça y est, le voilà !" Mais non.
De toute façon, il se souvenait à peine de son visage.
Il avait conservé secrètement le téléphone portable qu'il avait acheté près du bois de Valverde... Caroline ne savait rien de l'histoire des trois souhaits. Il le maintenait en activité mais ne l'utilisait jamais. En fait, ce téléphone ne conservait qu'un seul numéro en mémoire : 06-94-27-68-12.
Un soir, alors qu'il avait fermé la station-service et qu'il rentrait dans le petit pavillon caché derrière la boutique, il se sentit étrangement seul... Caroline passait le week-end chez ses parents et avait emmené les deux garçons. Richard les rejoindrait le lendemain.
Sans trop réfléchir, il monta les escaliers qui menaient à sa chambre. Il ouvrit le tiroir à chaussettes de sa commode. Il plongea sa main et attrapa le téléphone portable. Il composa le numéro.
"Bonjour, vous êtes sur la messagerie du 06-94-27-68-12, parlez après le bip sonore." Rien n'avait changé.
"Bonjour M.Vitti. Je souhaiterais vous rencontrer. Je souhaiterais que vous veniez, un soir, chez moi et que nous puissions discuter tranquillement. Ma femme fait étonnamment bien la cuisine et..."
Son invitation fut interrompue par le second bip de la messagerie.

 

Depuis plusieurs années, Richard avait perdu l'habitude de réfléchir à ce qu'il pourrait demander pour son deuxième souhait... Tout lui semblait possible mais rien ne lui convenait. Que pouvait-il demander ? Quelque chose dont il avait vraiment besoin et qu'il qu'il ne pouvait pas obtenir par lui-même. ? Mais était-ce encore normal, pour lui, de réclamer quelque chose qu'il ne pouvait pas obtenir seul ?
Sept ans auparavant, Richard réfléchissait au de la vie. De quoi avait-il besoin ? Sept ans plus tard, de quoi avait-il envie ?
Une fois raccroché, il fut tout étonné de ce qu'il venait de dire. Se sentait-il seul à ce point-là ? Mais il n'eut pas un instant l'impression d'avoir gâché quoi que ce soit. Il n'y avait plus qu'à attendre.
Sept jours plus tard, une lettre arriva à la station-service. Richard l'ouvrit et sortit une carte de visite au nom d'Antonio Vitti.
"Monsieur Antonio Vitti est heureux de vous faire savoir qu'il répondra bien à votre invitation à dîner, vendredi soir prochain à 21 heures. Salutations."

"- Caroline. Mon oncle va venir dîner chez nous vendredi prochain.
- Ton oncle ?
- Oui.
- Ça va être la première fois que tu vas me présenter à quelqu'un de ta famille. Je croyais que tu les détestais tous.
- En fait... lui, je le connais très peu. C'est grâce à lui que j'ai pu venir bosser avec monsieur Pérez, il y a sept ans. Mais il travaille beaucoup. Il est très occupé et il voyage tout le temps.
- Bon... C'est le frère de ton père ou de ta mère ?
- Ne commence pas à poser des questions, s'il te plait !
- Évidemment. Moi qui ai crû à un miracle..."
Caroline se montra sincèrement vexée de ne rien pouvoir savoir sur cet "oncle Antonio". D'où sortait-il celui-là ? Et la semaine fut difficile au sein du couple. Mais bon, entre le travail et les enfants, elle passa quand même vite et, le soir venu, Caroline mit comme il fallait les petits plats dans les grands.
Exceptionnellement, la station ferma à 20 heures et tous les panneaux lumineux furent éteints pour bien faire comprendre le message.
"- Est-ce que ton oncle sait que nous habitons derrière la station-service ?
- ...Oui, bien sûr.
- Parce que, avec toutes les lumières éteintes, il va avoir du mal à trouver le chemin pour rentrer dans le jardin.
- Ne t'inquiète pas. Il a toujours su me retrouver.
- Pourquoi dis-tu ça ?
- Pour rien !
- Ben voyons..."

 

d'accord, mais encore ?